Cinq fanatiques du Standard, appartenant au célèbre « Hell Side » ou à des clubs officiels, parlent avec leurs tripes. Les incidents à Charleroi et la position du président Bruno Venanzi les conduisent dans une impasse. Dont ils veulent sortir. Par le dialogue, de préférence.
Ils sont les anciens du célèbre« Hell Side », l’un des noyaux durs des fanatiques du Standard de Liège. Ils forment désormais ce qu’ils appellent la « Vieille Garde ». Ils n’ont pas la tête de l’emploi que le cliché populaire pourrait leur prêter : pas de tatouage apparent, pas de piercing, pas d’agressivité. « Man », « Mich », « Vicente », Alain et Kathy ont entre 40 et 54 ans. Tous ont une famille et un job.
Généralement hostiles à la presse — «Vous, c’est La Meuse la menteuse ? », s’amuse « Mich », fier de son bon mot –, ils ont accepté notre invitation. Pas par courtoisie. Mais par nécessité : ils veulent adresser leur courroux au président du Standard de Liège, un club qu’ils chérissent depuis plus de trente saisons, parfois quarante pour certains. «Dans sa lettre aux supporters », publiée en exclusivité dans nos colonnes mardi, «Bruno Venanzi reproche aux supporters présents à Charleroi de n’être pas intervenus pour empêcher quelquesuns de lancer les briquets et les fumigènes sur la pelouse. C’est un appel à la délation insupportable », gronde « Man », attablé dans le bistrot de Benjamin Nicaise, près du stade de Sclessin, côté terril. La plume du président leur laisse penser que, ne pas réagir équivaut à cautionner. «Résultat : tous les supporters sont interdits des six prochains déplacements du Standard. » Nos interlocuteurs s’estiment prisonniers, dans une impasse : «Si on laisse faire les fauteurs de troubles, on est puni collectivement. Si on réagit comme le demande le président, on est sanctionné par les autorités judiciaires. » « Man » parle en connaissance de cause : il a été condamné, en 2014, à Charleroi, à une interdiction de stade de 30 mois et une amende de 2.700 euros pour s’en être pris à un supporter dont le verre de bière devait atterrir sur la pelouse. On ne l’y reprendra plus, jure-t-il. «Venanzi veut qu’on balance les énergumènes qui ont perturbé le match à Charleroi ? Moi, je ne bouge plus. J’ai payé cher assez. Chacun à sa place. Si je suis au stade, c’est pour supporter le Standard, pas pour faire la police… »
Venanzi veut qu’on balance les énergumènes qui ont perturbé le match à Charleroi ? Moi, je ne bouge plus. J’ai payé cher assez. Chacun à sa place. Je ne suis pas là pour faire la police »
« Mich » non plus, on ne l’y reprendra plus. Il prétend que l’interdiction de stade de 6 mois et les 500 euros d’amende dont il a écopé après avoir pénétré de force avec d’autres comparses dans la salle de presse du stade de Sclessin pour dire leur façon de penser à l’ex-président Roland Duchâtelet, au soir d’une contre-performance contre Lokeren, a été mal interprétée. « Je voulais calmer les esprits, mais j’ai été condamné sur base d’une photo. Sans autre forme de procès…
» Les cinq Rouches qui nous font face sont unanimes : «Cette interdiction de déplacement collective, comme l’amende de 50.000 euros acceptée par le Standard, c’est une manoeuvre du président pour plaider la cause de l’équipe, montrer qu’il a pris une mesure importante, à l’inverse de Charleroi, et obtenir le gain des trois points. » Ils comprennent «la manoeuvre » mais prient l’homme fort de Sclessin «de revenir sur sa décision, prise beaucoup trop vite. À Charleroi, c’étaient des actes isolés. Ce sont les fautifs qu’il faut punir, pas les autres…
» Plus globalement, nos supporters réunis estiment qu’ils sont trop souvent stigmatisés. « Cela va être très difficile de décoller l’étiquette qu’on a dans le dos », estime Alain, rejoint par « Man », lassé d’entendre que « tous les supporters du Standard sont des barakis et des gamins de merde (sic) ». « On avait fait tout un foin des fumigènes lancés par les fans du Standard à l’Ajax, mais on n’a quasiment pas parlé des incidents causés par les supporters néerlandais à Sclessin », regrette Alain. À l’arrivée, le ras-lebol domine. « On n’a pas toujours été des anges, mais là, on a mûri », confie « Mich ». « Pourtant, on paye toujours aujourd’hui le fait d’avoir été fichés et d’être connus de la police. Mercredi encore, alors qu’on buvait un verre dans un établissement du centre de Liège, sans rien faire de mal, on a été interpellé par la police, fouillé, plaqué contre un mur. L’un des nôtres a même été arrêté, sous prétexte qu’il avait un mousqueton en guise de porte-clés. C’est clairement de l’abus. Qu’aurait pensé mon patron, s’il m’avait vu dans une telle posture ? Que j’étais un criminel…
» Très vite, c’est le choc wallon à Charleroi qui revient dans les conversations. «Il y a clairement deux poids, deux mesures », plaident-ils. « Lorsqu’on voit que Charleroi se prend une amende pour une interruption de match face à Saint-Trond et qu’on prend un match à huis clos pour un pétard à Malines, c’est incompréhensible. On voit le rôle important que joue Mehdi Bayat à la fédération. » Nicolas Penneteau ne trouve pas davantage grâce à leurs yeux : « Il a provoqué et n’a pas su maîtriser ses nerfs », estime Kathy. « C’est inadmissible. » Puis, c’est au tour des stewards d’être pointés du doigt. « À quoi servent-ils ? », se demande Alain. « Je me rends régulièrement à Tottenham et j’ai assisté à Angleterre-Ecosse. Lorsqu’un incident se produit, ils n’hésitent pas à monter dans la tribune et à en sortir le fautif.
» Dur, le boulot de supporter du Standard ? « Être sans cesse sanctionné parce que je suis reconnu comme un meneur actif du Hell Side, comme c’était écrit sur le dernier PV reçu, ça commence à me lasser », tranche « Mich ». « J’ai une famille et une vie sociale équilibrée. Vais-je continuer à venir à Sclessin ? Je me pose la question… » Egalement touchée, Kathy nous montre une conversation échangée par SMS avec son mari, lui aussi supporter des Rouches, le jour des incidents à Charleroi. « Comment peux-tu traîner avec cette bande de connards ? », demande-t-il. « Je lui ai répondu, en rentrant à la maison, que c’était comme lui lorsqu’il allait manifester avec son syndicat à Bruxelles… »
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