Même s’il s’en défend, c’est l’un des boss du vestiaire rouche. Avant d’aborder Bruges dimanche, Mpoku reconnaît que le Standard est au pied du mur pour les play-offs. Polo évoque aussi le Français de Sa Pinto, son petit frère Albert à Anderlecht, une éventuelle prime de champion, Harry Kane, le foot au Congo… et Jésus-Christ. Sans oublier bien sûr les cris de singe. Paul-José Mpoku passe « Sur le Gril ».
On le retrouve à l’Académie Robert Louis-Dreyfus, entre un entraînement et son épouse à aller chercher à la Maternité : Paul-José Mpoku est papa depuis ce lundi d’un petit Isaiah, son tout premier enfant. « C’est une joie immense, bien plus forte que marquer un but (rires). Je n’ai pas pleuré d’émotion, car je pleure très rarement : disons que j’ai pleuré… à l’intérieur. C’est un sacrée responsabilité, comme père et comme époux. J’ai même un peu les jetons : pour l’instant, pour changer le petit, j’observe comment les autres font (rires). S’il sera footballeur plus tard ? A mon avis, oui : dans la famille, tout le monde passe par là ! »
Car derrière Polo, il y a Albert Sambi Lokonga, le petit frère qui éclot à Saint-Guidon. « Pour l’instant, c’est moi le plus fort… mais à terme, ce sera lui. Il a la confiance d’Hein Vanhaezebrouck, c’est un vrai joueur d’Anderlecht : il a deux pieds, il joue facile et vers l’avant. Il a le cœur mauve, moi j’ai le cœur rouche… mais quand on est ensemble, on a le même cœur (rires). Je lui donne des conseils sur base de mon vécu : quand on s’est joués lors du Clasico, j’ai eu le plus grand stress de ma carrière… mais j’étais stressé pour lui ! J’avais tort : il ne s’est pas laissé faire, on s’est chambrés sur le terrain, je l’ai bougé deux fois… »
Ne jamais jurer de rien…
De là à voir les frangins réunis un jour sous les mêmes couleurs mauves ? « Je ne pense pas car je suis très attaché au Standard… mais on ne peut jamais jurer de rien : on voit bien ceux qui avaient promis que non… puis ont mangé leur parole. Donc je ne dis rien, la vie vous propose parfois des projets que vous ne pouvez pas refuser. C’est comme Yannick Carrasco et la Chine : moi aussi, je pourrais faire ce choix… et pas forcément en fin de carrière. Parfois, le train ne passe qu’une fois : pour nous, le foot est une passion mais aussi un travail… Il faut faire les bons choix au bon moment : je n’aurais jamais dû signer à Vérone, j’explique à mon petit frère qu’il faut toujours suivre son intuition plutôt qu’un dirigeant ou un coach… »
Dimanche, le Standard accueille Bruges pour l’un de ses derniers jokers sur la route des play-offs 1. « Bruges reste la meilleure équipe de Belgique, ils marquent beaucoup, ils ont des joueurs en forme et ils voudront se venger de la Coupe. Mais on va tout donner et on a aussi des atouts. Dans une saison, chaque équipe connaît des cycles forts et faibles et ça peut se payer cash avec le format des play-offs. Quand vous perdez la moitié de votre avance après la division des points, ça fait mal : on l’a vécu la saison avec Guy Luzon. Mais c’est aussi la preuve que tout est possible : si on arrive en play-offs 1, ce sera un autre championnat… et on aura nos chances. Si on a une prime de titre ? Je ne sais plus (sourire). Il faut demander à Régi Goreux, c’est lui qui négocie. » (rires)
Doux dingue…
Rapatrié à Sclessin avec Pocognoli pour redorer l’âme rouche, Mpoku reste sur deux rencontres comme réserviste. Le mercato hivernal est passé par là, avec le retour d’un autre pilier : Mehdi Carcela. « Je n’ai pas de souci à être sur le banc : le coach m’a expliqué qu’il voulait donner du rythme à tous les joueurs. Avant la trêve, on disait que notre noyau était trop juste et que tout reposait sur Junior et moi. Maintenant qu’on a des solutions, on en fait presque un problème… Au vrai, on a un vestiaire équilibré avec de grosses personnalités, mais où tout reste correct. De toute façon dans un club comme le Standard, on ne peut pas se permettre d’avoir des moutons. »
Et pour gérer ce groupe, un coach lusitanien au tempérament bien trempé. « Pour nous aussi parfois, Ricardo Sa Pinto semble un peu dingue… mais c’est un bon dingue (rires). Il nous motive, il nous protège, il nous libère en prenant tout sur lui. Chacun a son style, j’ai eu Luzon, j’ai eu Rednic, j’ai eu Riga : quand je reçois la confiance d’un coach, ça me donne des ailes. Sa Pinto me crie dessus ‘Allez Polo, allez Polo’ avec sa grosse voix et son accent. Et je vous rassure : moi, je le comprends quand il me parle Français ! » (rires)
Sanctionner les imbéciles
La Pro-Ligue a enfin agi en début de semaine : un plan antiraciste a été activé, assorti de lourdes sanctions. Les cris de singe à Bruges, à l’encontre de Mpoku et du Carolo Nganga, avaient reposé le débat. « Il était temps que les autorités bougent. On peut m’insulter, mais les cris de singe sont insupportables : c’est vous enlever votre dimension humaine, c’est vous rabaisser à quelque chose d’inférieur. Tout est une question d’éducation : un enfant va toujours imiter sans comprendre, d’où l’importance de lui donner un bon signal. Il faut donc commencer par expliquer, et seulement après sanctionner. Si ces cris de singe se reproduisent, je ne vous cache pas que je pourrais quitter le terrain en plein match : j’y réfléchis actuellement. Mais c’est délicat : je ne veux ni donner raison à ces imbéciles, ni pénaliser mon équipe… »
Depuis l’âge de 15 ans, Paul-José Mpoku pratique la Foi avec conviction. « Dès que je peux, je vais chanter à l’Eglise. Je lis la Bible deux ou trois fois par semaine. Jésus m’apporte la sérénité et le calme : je ne suis pas parfait, mais je suis sûr qu’aujourd’hui, je peux maîtriser mes émotions sur un terrain. J’aime bien servir d’exemple et tenter de propager du bon autour de moi : si je n’étais pas footballeur, je me verrais bien… dans l’évangélisation ! Pas pasteur, mais missionnaire : aller vers les autres pour les aider. Mais je ne suis pas dupe : certains utilisent la religion pour semer la violence ou s’accaparer du pouvoir. J’aime bien cette phrase de la Bible qui dit : ‘Sois zélé, mais avec intelligence.’ Mais le plus important, c’est de ne jamais oublier d’où on vient et inciter les jeunes à aller plus loin que soi. C’est pourquoi j’aimerais créer une académie de foot à Verviers, où j’ai grandi, pour offrir une structure aux enfants et aux parents. »
Dans la peau de Zizou…
Détenteur d’une jolie collection de maillots (« J’ai ceux de Defoe, Pogba, Kondogbia, Eto’o mais j’aime surtout avoir ceux mes potes, comme Michy et Thorgan« ), admirateur de Zidane (« Je me réincarnerais bien en lui…« ), Mpoku évalue aussi ses partenaires actuels. « J’avais vite cerné le potentiel de Luyindama mais celui qui m’épate le plus, c’est Marin : il sait vraiment tout faire. De mes ex-équipiers, je garde le contact avec Harry Kane, que j’ai encore félicité par texto il y a 3 jours pour ses 100 buts en Premier League. On s’est connus à Tottenham : il avait déjà ce flair de buteur. Mais je n’imaginais pas qu’il devienne aussi complet : il faut dire qu’il a beaucoup bossé pour. »
Mais pour affronter l’Angleterre de son pote Harry au prochain Mondial, Polo devra repasser : après avoir fait toutes les catégories de Diablotins, il a opté pour le Congo. « Quand je vois la ferveur du peuple sur place, je ne regrette rien. Je préfère avoir 50 caps chez les Léopards que 5 chez les Diables. J’avais consulté mes grands frères avant de me décider : regardez Pelé Mboyo, il a joué quelques minutes en 2 matches avec les Diables… et maintenant il est bloqué. Je suis aussi réaliste : avec les Diables actuels, je n’aurais pas eu ma place. La Coupe du Monde, je pourrai aussi la vivre plus tard avec le Congo : pour cette fois, on n’a échoué que de justesse face à la Tunisie. »
Bière rouche
Faute de Mondial, place à la remontada liégeoise ? Référence à ces play-offs fous de 2011 qui virent le Standard de Dominique D’Onofrio, qualifiés de justesse, échouer finalement… à un demi-point de Genk, un tel remake justifierait bien une célébration majeure… « Aragon Espinoza avait plongé dans la Meuse en 2008… mais moi, pas question : la Meuse est vraiment trop sale. » (rires)
On lui soumet d’autres challenges. « Sauter en parachute ou faire de la voltige en élastique ? Jamais ! Rapatrier le frangin au Standard ? Je ne vais pas lui faire ça (rires). Jeter un verre de bière sur Sa Pinto ? Ça oui, sans problème ! Oui, comme lors du match à Anderlecht. Mais je vous rassure : ce soir-là, ce n’était pas moi, j’étais déjà à l’intérieur ! » Au Standard, finalement, on a gardé son autodérision…
« Sur le Gril », un rendez-vous hebdomadaire d’Erik Libois à retrouver sur Vivacité le vendredi soir à 20h10, le samedi soir à 22h10 et le dimanche vers 16h30. Et le lundi en télé dans La Tribune.