Mircea Rednic n’est pas encore retourné en pèlerinage dans sa patrie d’adoption. Il n’a pas trouvé le temps de revenir humer les effluves de sa ville de prédilection, comme il en avait pris l’habitude naguère. Il s’en excuserait presque.

« J’ai repris du service en club un peu tardivement. J’ai donc été contraint de multiplier mes heures de travail. Mais rien de ce qui concerne le Standard ne me laisse indifférent : je pourrais décliner ses résultats sans me tromper d’un score… »

Au téléphone, la voix est claire, délestée de toute nostalgie, exempte de la moindre acrimonie. Le débit est vif, joyeux. Mircea Rednic a retrouvé, avec une délectation qu’il ne masque pas, un banc de touche, celui du Cfr Cluj, un club roumain de pointe.

Son passé, encore récent, d’entraîneur a pu l’affecter, le blesser peut-être, mais il ne l’a pas rendu amer. Parce que les vicissitudes de sa carrière, de sa vie même lui ont forgé une carapace, ont exacerbé son réalisme. Parce que, surtout, il ne tiendra jamais aucune rigueur au Standard, le club de son cœur, qu’il chérit toujours passionnément.

Alors, parce qu’il suit toujours le championnat de Belgique, il n’ignore pas que, ce dimanche, le Standard se déplace à Genk. Il s’est souvenu que, le 31 octobre 2012, il réalisait enfin son rêve : s’asseoir sur le banc de touche du club qu’il avait si souvent espéré entraîner un jour…

Mircea Rednic, quel souvenir conservez-vous de ce premier match comme coach du Standard ? « Je vivais passionnément, à la fois une concrétisation et un début. La concrétisation d’une espérance que je n’avais cessé d’alimenter, saison après saison. Et le début d’une superbe aventure même si, dans mes rêves les plus fous, j’avais imaginé que j’entamerais mon bail de coach du Standard au début d’une campagne et non comme roue de secours. J’ai vécu le match comme un rêve. Les joueurs ont eu l’élégance de m’offrir la victoire comme cadeau d’intronisation. »

Avez-vous digéré votre éviction, qui a attisé la vive colère des supporters du Standard ? « Oui. Parce que ces revers jalonnent en permanence la carrière d’un entraîneur. Cette éviction m’a déçu, certes. Elle m’a étonné, aussi, car j’estimais que j’avais réalisé du bon travail, même si nous avons connu quelques petits ratés pendant les playoffs. Mais à la fin, le résultat était positif. Il outrepassait même les espérances des dirigeants. Quand on m’avait engagé, on ne m’avait fixé qu’un seul objectif : l’accession aux playoffs 1. Les joueurs et moi avons qualifié le Standard pour l’Europa League et achevé notre parcours sur un authentique feu d’artifice, contre La Gantoise. J’ai quitté le club avec regret, certes, mais aussi la conscience tranquille : je n’avais pas failli. » Tenez-vous rigueur à Roland Duchâtelet de vous avoir remercié ? « Non. Je n’ai rien à reprocher au président : c’est lui le patron. Il a agi en son âme et conscience. J’ai connu pire en Roumanie… » Que vous a inspiré la réaction de colère des supporters à l’annonce de votre limogeage ? « Ces emportements, excessifs, m’ont navré. J’ai jugé incorrect l’accueil qu’ils ont réservé à Guy Luzon, mon successeur qu’ils ne connaissaient même pas. Je suis heureux, aujourd’hui, de constater que ces mêmes fans refont corps avec leur club : ils sont redevenus les vrais supporters du Standard ! »